Que sont bouddhistes et musulmans à côté de Pâques et chocolats ?


Joyeuse Pâques !

Jugeant le Carême trop inhumain pour qui est condamné au régime chinois, j'ai profité de la semaine sainte pour faire un parangonnage (oh oui, c'est le mot français pour "benchmark") des autres religions à ma disposition ici. Je me suis donc rendue dans l'un des plus vieux temples bouddhistes de Pékin (645 ap. J-C.), Fǎyuán Sì (le temple de la source de la loi). J'arrivai à l'heure de la fermeture (sans plan, j'avais erré dans les rues pour le trouver) et m'apprêtai à chanter mes suppliques au gardien pour pouvoir entrer quand même mais, par chance, se tenait ce soir-là une cérémonie avec une trentaine de moines chanteurs !
Toutefois, préférant pour montrer ma belle voix ouvrir un large bec, je laisse tomber ma croix une seconde fois : direction Niūjiē lǐbàisì. La mosquée de Niujie (= rue de la vache) est la plus ancienne mosquée de la ville (996 ap J-C.). Bien qu'elle se targue d'être sino-arabe, je vous mets au défi de trouver la moindre composante arabe dans cet édifice. Suite de courtines, charpentes chamarrées, toits courbés à tuiles vernissées, rouges, verts, bleus, jaunes, tous les ingrédients sont là pour faire un temple bien chinois - certes tourné vers la Mecque. Admirez bien le minaret - si vous le reconnaissez ! Je vous rassure tout de suite, les autres mosquées du quartier musulman offrent ce qu'il faut en pishtak, coupoles, iwans et chinoises voilées.
Le gardien m'ayant demandé si j'étais musulmane, s'eut été l'occasion rêvée de me réinventer une vie ici mais, la pensée d'un bon jambon suffisant à me faire saliver, j'aurais eu quelques remords je crois. Alors je suis rentrée dare-dare m'adonner au seul culte qui vaille, rangeant ma spiritualité pour un soir. La danse. Mais ce n'était que pour retrouver Noël en avril à Sanlitun dont le mauvais goût des illuminations rivalise avec São Paulo.
Justement, en parlant de São Paulo. Cela fera bientôt un mois et demi que je suis ici et s'il est une chose dont je suis sûre, c'est que le Brésil fait honneur à sa qualification : le géant qui dort. Tous les Brésiliens sont persuadés d'être à l'aube d'un miracle économique sauf qu'avec moins d'1% de croissance en 2012 et les budgets bloqués jusqu'à 2016 pour l'organisation des JO et de la coupe du monde, le pays se complait à demeurer soporifique. Il y a un tel gouffre entre la Chine et le Brésil. Soit, au Brésil il fait beau, les gens sont souriants, tout le monde semble heureux et soit les Chinois sont vilains, malpolis et étrangers à toute notion d'allegria (pris en général, quand on les connait personnellement ils sont très sympas). Cependant, c'est ici que souffle le vent du progrès et du dynamisme. L'innovation n'est pas qu'un mot dans la bouche des dirigeants, ça fourmille d'incubateurs, de jeunes entreprises et de nouveautés.

Ayant déloyalement profité de la censure de facebook, twitter & Cie, les sociétés digitales chinoises se sont gavées de l'appétit des petits geeks bridés pour les réseaux sociaux et sont prêtes à déferler sur l'Occident. Contre tous les prognostiques les plus optimistes, le marché de l'e-commerce en Chine est d'ors-et-déjà le plus grand du monde (alors qu'il ne devait l'être qu'en 2015), il y a plus de milliardaires ici qu'aux Etats-Unis depuis mars (ce qui était complètement inattendu), le chiffre d'affaires d'Alibaba Group a dépassé ceux d'Amazon et ebay réunis (ses concurrents) et son entrée en bourse est aussi attendue que l'était celle de facebook (à ce sujet vous pouvez consulter la une de The Economist de la semaine dernière). L'un des concurrents d'Alibaba, Tencent, a développé WeChat, l'application mobile qui révolutionne la messagerie instantanée et combine Whatsapp, Skype, Msn, Viber et facebook (pour le newsfeed et le chat) tout en étant bien plus ergonomique que les services sus-mentionnés ! WeChat a déjà conquis 300 millions d'utilisateurs et va bientôt frapper à votre écran. Leur adoption de la technologie bien plus avancée que la nôtre (dans le métro, tout le monde est sur son ipad), n'est pas forcément une bonne chose mais elle dénote de la ferveur que ce peuple a pour être à la pointe.

Alors préférè-je le Brésil ou la Chine ? Le Brésil était plus fun mais la Chine est clairement un pays bien plus intéressant avec une vraie histoire et qui ne se repose pas sur ses lauriers. Je n'ai pas encore voyagé hors de Pékin (parce que j'ai cours tout le temps pour l'instant - ça ne va pas durer éternellement) mais les panoramas que semble offrir ce pays devraient être tout aussi impressionnants si ce n'est davantage.

Mon chinois n'avance pas car le cours est à 8h du matin donc autant dire que tout le monde le sèche allègrement. Quand j'ai demandé si l'on pouvait le décaler, la prof a rigolé. Elle n'a pas compris ce que c'est qu'être jeune et paresseux.

Et Pékin est le meilleur ami de Pyongyang donc je ne devrais pas être affectée par le conflit de la péninsule de Corée (sauf que je comptais aller à Séoul pour le 1er mai).

Mes cookies m'attendent, bonnes Pâques !

Païennement vôtre,

N

Pour vous faire retirer de la liste de diffusion, rien de plus simple ! Envoyez-moi un message me disant que je peux raser mes beaux cheveux et me faire moine bouddhiste et que ça ne vous fait ni chaud ni froid.