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Nouvelles #6 Bonne année du mouton !

le 10/3/2015


Agneau quercynois (Source photo : http://grandsjardins.over-blog.net/) et tirelire offerte par ma banque
Excellent nouvel an chinois à tous !
Cette année nous célébrons les moutons, l'occasion pour moi de vous présenter la superbe race des moutons du Quercy qui présente le double avantage d'être aussi adorable avec ses lunettes noires que délicieux en gigot. L'occasion aussi pour ma banque de continuer à m'infantiliser et me fidéliser en m'offrant ce mouton tirelire (ils m'avaient offert une peluche de poney à mon arrivée si vous vous souvenez bien).

Nous étions justement plusieurs centaines de milliers de désœuvrés à passer la soirée à regarder passer l'une des plus grandes parades de célébration du nouvel an au monde, avec son lot de monstres, de politiciens (serait-ce redondant ?), d'oriflammes et de fanfares.
"Elle est aux Etats-Unis, pourquoi vient-elle nous enquiquiner avec les chinois ? C'était l'an dernier ça !" Infidèles ! Ne savez-vous pas que le Chinatown de San Francisco revendique plus de visiteurs que le pont du Golden Gate ? que San Francisco abrite une des plus grandes communautés chinoises hors d'Asie ?


La majeure partie du défilé est constituée par les écoles de la région

Les politiciens sont également de sortie en adressant des saluts désintéressés à la foule depuis leurs voitures d'apparat

Certaines universités s'invitent également avec leurs fanfares
Le défilé chinois est avant tout un défilé communautaire avant d'être racial. Ce sont les habitants du quartiers et les sympathisants de la culture qui y participent. Il suffit d'être bridé de cœur pour prendre part à la parade. C'est ainsi que la moitié des exhibitionnistes ne possède pas un semblant de gène asiatique. Défilent ainsi les écoles primaires de la région proposant l'enseignement du chinois, les commerces de proximité (le teinturier et McDonald's avaient leurs chars par exemple), les shériffs, sénateurs, maires, procureurs et autres élus de toute la baie qui sortent pour l'occasion des Cadillac, des Rolls Royce, et leurs petites familles au sourire Colgate. Très bon enfant en fin compte.

Et bien sûr, il y a les traditionnelles danses du lion et du dragon! Le dragon est à la poursuite d'une perle (la sphère représente la sagesse) comme vous pourrez le voir sur les vidéos. Il est composé d'une équipe d'une dizaine de personnes voire plus qui démontrent par la souplesse des mouvements et la rapidité de leur bête de papier leur coordination. D'ailleurs, plus le dragon danse longtemps, plus l'on est censé accumuler sur la ville de chance pour l'année à venir.

Vidéos de danses du dragon - sur la seconde, on remarque que cela manque un peu de coordination

Ces deux photos: Sophia Germer, The Chronicle

Des lions
Nous venons donc avec ces créatures d'établir le lien cosmique pour accueillir comme il se doit le petit mouton 羊 yáng et faire fuir le cheval 馬 mǎ. Laissons-nous à présent glisser dans une année placée sous le signe de la prospérité (ça commence bien, sans rien demander on m'a donné une augmentation de salaire de 30% - certes n'entrant en vigueur qu'en octobre) et poursuivons notre histoire.

Le weekend dernier fut pour mon colocataire l'occasion de m'entrainer une fois de plus courir à ma mort sur des petits sentiers à fleur de falaise au milieu des redwood (ce sont les grands et fins) et des séquoias (ce sont les grands et gros). Haletante, les chevilles foulées, les genoux déraillants, le point de côté exacerbé, le souffle au cœur renaissant et la langue pendante, je suis sortie rescapée de ce piège qui dura trois bonnes heures.
La torture ne fut pas si terrible à vrai dire, sa répétition hebdomadaire atténuant l'effort et amoindrissant les courbatures. Je peux à présent entre deux respirations désespérées donner un coup d'œil au paysage et me délecter du spectacle de la forêt dont je vous laisse apprécier la sève en photos.
Au bureau cela va mieux, je me suis organisée pour rationaliser mon apprentissage. Même s'il y a beaucoup de zones d'ombre encore, l'obscurité se meurt. Ils m'ont dit qu'ils étaient contents de moi. Donc mon air niaiseux doit étouffer le Cri de Munch que j'ai l'impression de faire à chaque fois que j'entends un nouveau concept. Je suis désormais responsable de deux clients au fait !

Le Cri
et mon sweat à capuche de l'entreprise, attestant mon appartenance nouvelle à la secte des geeks de la Silicon Valley (le logo est une fiole avec un cœur dedans)
Petit élément perturbateur dans mon travail : certains de mes collègues amènent leurs chiens. En général ils me laissent indifférentes, m'étant établie dans le camp des félidés il y a bien longtemps. Cependant Ginger, la chienne d'un membre de mon équipe, est vraiment trop mignonne, ce qui me déconcentre à chaque fois qu'elle vient se frotter contre mon bureau. Garçons et filles, tout le monde lui fait des câlins tout le temps.

Pour évacuer le stress induit par le temps que je consacre à jouer avec Ginger au lieu de papouiller mes clients, R a découvert la présence d'un sauna dans notre résidence et nous l'utilisons allègrement depuis le soir.

Il s'avère en effet que les Amériques sont vastes et que les américains ont de la place. Et comme les constructions sont récentes, elles intègrent toutes ce genre d'élément minimal de confort qu'est le sauna. Le coin où nous sommes étant une certaine idée de l'Amérique, beaucoup de maisons se réunissent en "communautés" (sortes de copropriétés de voisinage) pour partager des équipements comme des terrains de tennis, des piscines, des jardins, etc.

La contrepartie d'un tel étalage est l'usage obséquieux de la voiture et l'absence de centre-ville ou de place de marché où les gens se retrouvent. A cet égard, la Silicon Valley me rappelle le Brésil de mes camarades brésiliens aisés de l'université qui ne comprenaient pas que l'on puisse faire ses courses à pieds ou ne pas vouloir monter en voiture pour faire deux rues (si c'était pour des raisons de sécurité initialement, cela me semble évoluer dangereusement vers un confort un peu paresseux).

L'entrée d'un restaurant prisé, cachée par des voitures et qu'un parking monstrueux entoure des quatre côtés
Ainsi, les commerces sont tous éparpillés un peu au milieu de nulle part chacun dans la région. R me fait remarquer que les restaurants sont au milieu de la nature. Certes, mais comme il faut un véhicule pour s'y rendre quoi qu'il arrive, il y a donc une route (et les routes sont larges ici) et un parking géant ce qui cache complètement la vue en terrasse.

La route de San Francisco qui longe la baie

Le chemin du bureau à travers collines et champs
Les routes sont belles puisqu'elles passent entre des collines vierges ou des pâtures. C'est la destination qui n'en vaut pas vraiment la peine puisque tout est en matériau de pacotille avec vue sur parking. D'ailleurs, ici, il n'y pas de trottoirs et lorsqu'il y en a ils sont discontinus et l'on se retrouve toujours sur la chaussée en pleine zone résidentielle. Impossible de marcher sans que cela n'ait été prévu à l'avance donc et il devient bien difficile de se perdre dans des rêveries de promeneuse solitaire. Adieu la déambulation bienheureuse qui fait la Parisienne et mûrit sa réflexion. La rue est mon étude et sans pavés à arpenter ni trottoir où flâner, mon esprit ne tardera pas à se déliter.

Le chef a préparé des asperges et l'odeur chatouille mes narines. L'estomac primant toujours sur toute contemplation, amis du soir, bonsoir !

N