Curiosix Une parisienne parmi les paulistes

Sommaire

30°C, dia primeiro

le 29 juillet 2012



Les onze heures d’avion se sont finalement bien vite envolées grâce à un sympathique voisin brésilien (de Curitiba, 350km au sud de SP – ce qui est près (!) étant donné les distances dans cet immense pays) et à un super film, Salmon fishing in Yemen (avec Ewan McGregor et Emily Blunt). La conclusion de ce vol est sans aucun doute qu’outre une plus belle couverture, une trousse de toilette cadeau, des miles et un siège qui s’incline davantage (mais toujours pas assez), la Business n’offre pas grand chose de plus que la classe éco. Comme le plus important pour moi reste la nourriture et comme le steward m’a gavée comme une oie, j’ai donc voyagé comme une princesse parmi les pauvres.

On se fait une première idée de la corruption ambiante au contrôle des passeports : près de la moitié des passagers brésiliens emprunte la queue « diplomates – prioritaires ». Je vous mets au défi d’en trouver un parmi eux qui ait un travail qui ne soit pas de ronfler très fort derrière un bureau. On commence à se sentir très bien accueillis lorsque l’on comprend que, de la quinzaine de guichets, seul un est destiné aux internationaux (la fille ne parle même pas anglais d’ailleurs) et que les prioritaires susmentionnés sont, bien entendu, prioritaires sur ce comptoir-là aussi. Cependant, lorsque votre valise vous attend sagement sur le tapis roulant au lieu que vous n’ayez à l’attendre et lorsqu’il n’y a personne dans la file taxi, vous vous sentez un peu mieux.

L’appartement est situé au quatrième étage d’un immeuble sur dix-huit niveaux qui comprend une piscine et une salle de sport. Il y a peut-être même un petit jardin derrière aussi – il faudra que j’explore. L’appartement est grand mais les meubles sont assez moches. Nous sommes cinq : une italienne en troisième année de la Bocconi ; un italien qui a fait un échange ici dans le passé et est revenu pour chercher du travail, il est depuis trois mois chez McKinsey Brésil ; une française qui a déjà fait un échange de six mois + un stage de huit à SP et qui vient à présent passer une année entière ; puis H. et moi. Trois françaises et deux italiens donc. L’italien m’a d’ailleurs raconté (maman, ne lis pas ce qui suit) qu’il s’était fait braquer la semaine dernière et que l’un de ses agresseurs était décédé dans la nuit après un échange de coups de feu avec la policia qui les poursuivait.

Petit détail qui a son importance : les fenêtres sont toutes sur des rails (elles coulissent comme des baies vitrées) mais au lieu d’avoir deux vitres, il n’y en a qu’une dont la largeur est la moitié de la largeur de la fenêtre ! Si bien que je peux la déplacer sur toute la longueur mais ma fenêtre n’est jamais fermée totalement ! Et pourtant j’ai bien deux volets. Je peux faire la quasi-nuit dans ma chambre mais les courants d’air sont toujours là en revanche ! Et c’est comme ça partout dans l’immeuble.

L’appart est dans un quartier chic, Jardim. Comprendre par là que tous les immeubles sont enserrés de grilles. Le nôtre a un gardien qui gère les entrées et les sorties de tout le monde. Sinon, pour une parisienne, ce n’est pas très beau. C’est surtout très incohérent : les revêtements des trottoirs ne sont pas uniformes, les grilles bloquent la vue et ne sont pas homogènes, les immeubles ne présentent aucune harmonie architecturale. Surtout, la lumière la nuit est assez blafarde. J’attends d’aller Rua Oscar Freire (leur avenue Montaigne) et Avenida Paulista (leurs Champs-Elysées) avant de me prononcer sur le chic à la brésilienne. L’histoire des gens qui se déplacent par hélicoptère d’une tour à l’autre (5644 tours apparemment à SP) semble vraie vu que plein d’hélicoptères nous survolent sans arrêt.

J’ai été ravie de découvrir un grand Carrefour, Rua Pamplona, juste à côté de ma rue (mais lorsque j’en rentre avec les courses c’est en montée). J’ai pu acheter une plante pour ma chambre (spéciale dédicace à mon ancienne meilleure coloc, Laura), de la nourriture, et regarder l’enchainement d’une gymnaste roumaine aux JO sur grand écran. Ils ont plein de légumes étranges mais je suis restée sur les classiques batatas, cebolas, cenouras, pimentos et bananas (comprendre pommes de terre, oignons, carottes, poivrons et bananes).
Vu qu’ils sont tous sortis hier soir, personne n’a émergé avant midi aujourd’hui donc je suis restée dans ma chambre à faire mon petit raffut car je lavais les murs (l’intruse qui dormait sur le canapé du salon a dû apprécier). H. étant en séminaire, je suis partie à la découverte de la ville comme une grande mais toute seule. J’ai passé l’après-midi au Parque do Ibirapuera où les brésiliens sortent le dimanche. Une sorte de jardin du Luxembourg qui a la verdure et la skyline de fond de Central Parc. C’était extrêmement agréable puisqu’il faisait en ce terrible hiver brésilien… 30° C. Il y a plein de vendeurs, sorvetes (= glaces), sur tout le pourtour du lac qui proposent entre autres des noix de coco à boire à la paille pour 5 R$ (~2€). Il y a aussi des espaces avec des appareils de bien-être/musculation en libre-service, je crois que c’est quelque chose qui se fait beaucoup en Chine aussi. Devant le parc, il y a une colossale statue de Bandeirantes, qui sont les hommes qui pénétrèrent le Brésil. Ce monument, un des plus célèbres de São Paulo (les Brésiliens sont extrêmement fiers des Bandeirantes qui ont repoussé les frontières très loin sur le territoire espagnol), est surnommé le « Why just me » car, malgré leur grand nombre, seul un unique conquérant est en train de s’user à pousser la lourde barque.
Ce qui m’a énormément marquée c’est la mixité. Quasiment la moitié des couples ou des groupes d’amis sont mixtes. Il y a un incroyablement large éventail de couleurs qui sont autant dues au métissage qu’au bronzage. Je pense typiquement à une petite rousse avec des tâches de rousseur qui marchait devant moi avec sa meilleure copine qui était presque noire. Bien sûr, en réalité, ici aussi les nantis sont blancs mais dans ce parc c’était frappant à quel point ils sont beaucoup plus mélangés que chez nous.

Até à próxima !